Après plus de 40 ans passés sur la Côte des Bar en tant qu’œnologue-conseil, Philippe Narcy fait valoir ses droits à la retraite, mais il garde un œil sur la Champagne avec une activité œnologique de consultant.

Ses paroles résonnent dans toute la Champagne depuis plus de quarante ans. Œnologue-conseil et directeur de l’agence barséquanaise de l’Institut œnologique de Champagne (IOC), Philippe Narcy intervient aussi en Bourgogne, Alsace, Côte du Rhône, et même en Italie. Après une carrière bien remplie, ce défenseur de la Côte des Bar et de sa qualité des vins aspire à un repos bien mérité, mais pas à un arrêt total d’activité.

Homme de contact passionné

Originaire d’un petit village au nord de Saint-Dizier en Haute-Marne « où il n’y a pas de vigne », comme il le fait remarquer, Philippe Narcy, diplômé d’œnologie, a commencé sa carrière en Champagne et à l’Institut œnologique de Champagne à Bar-sur-Seine, dès la fin de son service militaire en juillet 1984. Il y est resté jusqu’en septembre dernier. Pour celui qui se voyait phytothérapeute, être œnologue-conseil était une manière de combler ses envies, de s’épanouir et se prendre de passion pour la Champagne et les terroirs de la Côte des Bar. Homme de contact, il a aussi apprécié l’itinérance du métier et les rencontres avec des femmes et hommes enthousiastes.

En 1989, il est devenu co-directeur de l’agence IOC, avant de la diriger l’année suivante. « Si je regarde 40 ans en arrière, les exploitations étaient différentes, les maisons mettaient tout en bouteille. Elles n’avaient qu’une cuvée brut de base traditionnelle qui, vieillie, devenait une cuvée réserve. La législation a changé, raconte-t-il. Petit à petit, tout a évolué. Il y a le vin bloqué. Il y a eu tout un travail à faire sur des assemblages. Aujourd’hui, il y a parfois dix, douze références. »

Une aide pour les assemblages

Les assemblages, Philippe Narcy les apprécie tout particulièrement. Expert en méthode traditionnelle, il a milité dans le même temps pour les cuvées 100 % pinot blanc (lire par ailleurs), pour le Rosé des Riceys, ou encore pour que les vignerons aubois participent à des concours afin de promouvoir leurs vins et montrer leurs qualités. « Au milieu des années 90 par exemple, je me suis aperçu qu’il n’y avait quasiment pas d’échantillons présentés au VITeff (salon international des technologies des vins effervescents). J’ai dit aux vignerons : présentez vos vins aux concours, il n’y a pas de honte à avoir, car j’étais persuadé qu’il y avait une certaine qualité. Et petit à petit, en les présentant, l’Aube est sortie régulièrement. Dans les concours, l’Aube récupère entre 25 % et 50 % des médailles, alors que les bouteilles ne représentent que 6-7 % de la Champagne ! », argumente celui qui est intarissable sur le sujet, mêlant avec une grande aisance anecdotes et dates précises.

« Depuis 41 ans, je m’amuse bien »

Au long de ces années aux côtés des vignerons, Philippe Narcy est heureux d’avoir pu accompagner chacun avec ses particularités. Il a fait valoir son exigence de qualité, toujours visé l’excellence et osé avancer ses opinions et convictions. « J’ai une obligation de résultat. J’essaie donc de faire le mieux possible. Je veux être fier de ce que j’ai fait », pointe-t-il, s’intéressant aussi à la culture de la vigne, et surtout au moment clé de la maturité des raisins, en suivant de près les équilibres. « C’est année, si on vendangeait au bon moment, on pouvait avoir des jus naturellement bien équilibrés », glisse-t-il, pensant à ceux qui ont voulu attendre la maturité maximale.

Le Mérite agricole demandé par trois vignerons

Parmi les moments importants qui ont jalonné sa carrière, Philippe Narcy rapporte la médaille du Mérite agricole épinglée en 2012 pour « services rendus auprès des vignerons », suite à une demande effectuée par trois vignerons : Étienne Doué, Pascal Gerbais et Sylvère Massin. Il cite encore, avec une certaine émotion, la cuvée qu’Éric Doué lui a demandé de nommer (Il était une fois) et le macaron « de Philippe Narcy » sur les bouteilles.

Philippe Narcy est ravi d’avoir pu travailler avec plusieurs générations de vignerons : trois par exemple au champagne Pierre Gerbais. Il est heureux d’avoir transmis sa passion à sa fille, œnologue en Alsace, et d’avoir pu former, ces trois dernières années, la jeune Léa Laval, qui lui succède chez IOC et pour laquelle il loue déjà la passion et les qualités. Et de ponctuer : « Depuis 41 ans, je m’amuse bien. Ça a bien évolué et la reconnaissance actuelle de la Côte des Bar me satisfait »

À la demande de certains vignerons, Philippe Narcy vient de créer sa micro-entreprise de consultant pour assurer en douceur et « bonne intelligence », la « transition ». Il vient de déménager en Alsace et souhaite ainsi davantage profiter de sa famille et de ses deux petits-enfants. Celui qui a par le passé mené la compagnie des archers barséquanais et obtenu plusieurs titres de champion de France de tir à l’arc, pense renouer avec la pratique de cette discipline sportive. Il devrait aussi s’adonner un peu plus à la guitare. Une vie qui devrait donc être bien rythmée.